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La literie française sauvée in extremis

22 mars 2015 par Eric LOMBARDI

J’aurais pu titrer cet article « Tragédie sur l’oreiller ». Il raconte un événement qui s’est produit au début du mois de mars dans le petit monde du mobilier français et qui a étonnamment fait peu de bruit dans les médias. Résumons les faits et je laisserai à chacun la possibilité de faire sa propre opinion.

L’épisode

Le 5 mars dernier, le groupe CAUVAL industries a échappé de peu à la faillite en signant, sous l’égide du ministère de l’économie et des finances, un accord secret avec le distributeur But. Cet accord met un terme à plusieurs mois de bataille entre les deux et va permettre au premier de redonner des couleurs à une trésorerie exsangue. Dit comme cela, ça ne fait pas lever les foules mais si je vous apprend que CAUVAL est le propriétaire de Dunlopillo, Simmons, TRECA, et que But est son deuxième client avec 25% des ventes, ce n’est plus pareil.

Une lente agonie

Début des années 1990 – L’homme d’affaires Gilbert Wahnich et son avocat Gilles Silberman fondent CAUVAL. Le groupe devient rapidement le leader de la literie française et sa branche canapés, avec DIVA, est en plein boom.
Début des années 2000 – CAUVAL subit de plein fouet la concurrence des canapés chinois sans parvenir à développer une image propre. La branche concernée, qui a représenté jusqu’au 2/3 du groupe, est en train de le « plomber ».
2008 à 2010 – Placement en procédure de sauvegarde, l’entreprise passe de 6000 à 3000 salariés.
2013 – Le groupe accuse une dette auprès de l’Urssaf de 52 millions d’euros
Juillet 2013 – But prête 2 millions d’euros à CAUVAL.
Octobre 2013 : Cauval et DODO se rapprochent par échange mutuel de licences.
Ete 2014 : Le groupe n’est pas en mesure d’honorer une créance de 8 millions d’euros à l’administration fiscale.
Second trimestre 2014 – But accuse CAUVAL de ne pas avoir remboursé les 2 millions et de ne livrer qu’un matelas commandé sur 2. Une entreprise est créée avec un groupe chinois De RUCCI. En échange de 14 millions d’euros, CAUVAL lui a offert sur un plateau la licence et la fabrication des matelas TRECA haut de gamme vendus en chine. Le groupe de Gilles Silberman détient 35% des parts de cette entreprise.
Novembre 2014 : Le bruit court dans le milieu du meuble que la faillite est proche. De nombreux distributeurs annulent leurs commandes.
Décembre 2014 : Certains font circuler le bruit que le bilan a été déposé. CAUVAL accuse But de faire déférencer pour 2015 les marques de literie du groupe.
Fin février 2015 : Les salariés de l’usine de Bar-Sur-Aude alertent les médias: « Les salaires de février ne seront pas payés ». Le groupe assigne But en justice en l’accusant de tentative de déstabilisation.
5 Mars 2015 : Accord avec But sous l’égide du ministère de l’économie et des finances.

Des suppositions

  • Tout au long de cette descente aux enfers, le vice président du groupe, Gilles SILBERMAN, a accusé But de favoriser voire de provoquer la faillite du groupe afin de le racheter à bas coût. Il est certain, au moins à un moment, que Conforama avec le succès de sa branche literie « Nightattitude » et, en corollaire, les gains de 12% de parts de marché a peut être donné l’idée à But de détenir sa propre branche de literie.
  • Il est à supposer que la proximité des élections départementales a fortement influencé l’état à intervenir. Il est clair que la fermeture de 3 usines et la mise au chômage de 2800 travailleurs et ce, 3 semaines avant le premier tour, aurait fait mauvais genre. En cas de nouvelle défaillance et d’absence d’échéances électorales, il n’est pas dit que les ministres fassent l’effort. Toujours est-il que l’accord est secret, le communiqué de presse laconique, et l’avenir du groupe toujours incertain.
  • Enfin, CAUVAL aurait sauvé sa peau en mettant en avant les 14 millions d’euros de son accord avec De RUCCI. Est-il vrai cependant que, comme murmure le milieu, la licence TRECA appartenait à la famille SILBERMAN seule? Auquel cas, la communication de ces fonds aurait servi à tromper l’état et à tenter vainement un massage cardiaque à une entreprise déjà condamnée.

Epilogue

Quoiqu’il en soit, la situation du groupe et l’état de sa trésorerie sont tels que quelques mois seulement suffiront pour que l’intrigue s’éclaircisse et que l’on comprenne la stratégie de chacun. Affaire à suivre.


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